Alors que les déchets abandonnés restent un enjeu majeur pour la qualité de vie et la préservation de l’environnement, l’association Gestes Propres dévoile les résultats de son tout premier baromètre national sur le sujet.
Réalisée en partenariat avec l’Ifop, cette étude inédite permet de mieux comprendre les comportements, perceptions et leviers d’action pour lutter contre ces incivilités du quotidien.
À travers cette interview, Gestes Propres revient sur les enseignements clés de l’enquête et les actions envisagées pour faire évoluer durablement les pratiques.
“Les Français considèrent leur quartier comme nettement plus propre que le reste du pays, ce qui montre que l’attachement au lieu de vie influence directement les comportements et peut freiner les incivilités.”
Aude Guiomar
Déléguée générale Gestes Propres
Question 1 : Pouvez-vous vous présenter et nous expliquer le contexte dans lequel cette étude sur les déchets abandonnés a été réalisée ?
Gestes Propres est une association d’intérêt général qui agit depuis plus de 50 ans contre les déchets abandonnés. Dans le cadre de notre mission, nous avons l’habitude de mener des études pour comprendre les comportements et adapter nos actions de sensibilisation afin de réduire l’abandon de déchets dans les espaces publics, urbains et naturels.
Avec ce baromètre, nous franchissons une étape : installer une mesure régulière et nationale des comportements. Les équipes de l’Ifop ont mené cette enquête en septembre 2025 auprès de 2 001 personnes représentatives de la population française, avec un objectif clair : suivre l’évolution des gestes – bons comme mauvais – mais aussi celle des idées reçues, qui influencent fortement les pratiques.
Basé sur du déclaratif, ce baromètre évalue également les perceptions en lien avec la notion de propreté et de respect de nos environnements.
Cette première vague confirme trois constats :
- Les incivilités liées aux déchets restent parmi les plus choquantes,
- la visibilité du phénomène est très forte à l’échelle nationale,
- mais les pratiques d’abandon persistent avec 35 % des Français qui déclarent avoir jeté au moins un déchet dans l’année.
Ce baromètre constitue désormais notre base de référence pour guider nos actions et objectiver les évolutions.
Question 2 : Les Français jugent l’abandon de déchets bien moins visible dans leur quartier que dans les villes françaises de manière générale (qu’il s’agisse des déchets de type « emballages », de gros déchets ou de mégots de cigarettes).
Selon vous, comment cet enseignement pourrait-il être mobilisé pour encourager les bons comportements ?
Ce décalage de perception est un levier puissant : les Français considèrent leur quartier comme nettement plus propre que le reste du pays, ce qui montre que l’attachement au lieu de vie influence directement les comportements et peut freiner les incivilités.
Ce que nous observons sur le terrain va dans le même sens.
C’est ce qui nous a conduit à créer le dispositif « Parce qu’ici c’est chez nous », mis à disposition des communes en open source, pour valoriser cette exemplarité locale et renforcer le réflexe de préservation du territoire.
L’étude met aussi en lumière deux autres leviers importants :
- 58 % des Français ramassent déjà des déchets abandonnés par d’autres. Cela confirme qu’il existe un socle d’engagement citoyen à rendre plus visible, pour renforcer la responsabilité collective et encourager les pratiques positives.
- 68 % renonceraient à jeter un déchet en présence d’un proche, 76 % en présence d’un enfant. Cette dimension de pression sociale est décisive et mérite d’être intégrée davantage dans nos actions de communication et d’amplification des bons comportements.
Ces enseignements convergent : plus les citoyens se sentent liés à un lieu et observés par leur communauté, plus ils adoptent des comportements vertueux.
Question 3 : À la lumière des enseignements de cette étude, quelles suites envisagez-vous ? Quels leviers souhaiteriez-vous activer pour renforcer la lutte contre l’abandon de déchets ?
Les résultats montrent trois enjeux majeurs : des idées reçues encore très présentes (86 % font au moins une erreur parmi une liste non exhaustive d’idées reçues) ; une part non négligeable d’actes d’abandon (35 % ont jeté au moins un déchet sur un an) et de fortes différences entre territoires.
Cela nous conduit à 3 grandes orientations :
- Renforcer la pédagogie pour corriger les idées reçues qui alimentent les mauvais gestes ;
- Accompagner les collectivités avec des campagnes locales, personnalisables et plus globalement des outils clés en main ;
- Amplifier la mobilisation citoyenne, en valorisant les comportements positifs et en soutenant des initiatives comme les opérations de ramassage.