En ce début du mois d’octobre 2025, l’IFOP dévoile la cinquième vague de son baromètre sur le bien-être de Français pour la Fondation AESIO. En voici les principaux enseignements :
- Le moral des Français en léger recul en 2025, marqué par un clivage générationnel
L’année 2025 se caractérise par un affaiblissement du sentiment de bien-être mental au sein de la population française. La part de ceux qui s’estiment dans un état de santé psychique « très bon » ou « excellent » recule de 4 points en un an, passant de 43% en 2024 à 39%.
Le facteur générationnel apparaît comme central dans l’explication des inégalités de santé psychique :
- Près d’un tiers des moins de 35 ans (28%) se déclarent en état de santé mentale moyen ou mauvais, proportion deux fois plus élevée que chez les 65 ans et plus (15%), tranche d’âge relativement préservée.
- Le poids des responsabilités joue également : les aidants sont davantage exposés à la souffrance psychologique (30% contre 20% pour les non-aidants).
- De même, la présence d’un proche en détresse psychique triple la probabilité de se sentir mal soi-même (33% contre 13%).
La proportion de Français déclarant avoir traversé des épisodes de souffrance psychique au cours des douze derniers mois reste stable, mais à un niveau élevé : 55%, dont 16% de manière régulière et 39% de façon occasionnelle. Les jeunes sont particulièrement touchés (63% des moins de 35 ans sont concernés, contre 36% seulement des 65 ans et plus). Sur cette exposition à la souffrance psychique, la différence entre hommes et femmes se resserre (53% contre 57%), suggérant une diminution d’un écart de genre sur le sujet par rapport à 2024 (respectivement 42% des hommes et 63% des femmes étaient concernées).
2. Un recours limité aux professionnels de santé mentale et des freins marqués par un tabou persistant
Si la majorité de la population déclare avoir été en souffrance psychique au cours de l’an passé (55%), moins d’un tiers des personnes concernées (28%) ont consulté un professionnel. Ce recours est néanmoins plus fréquent parmi ceux qui souffrent de manière régulière (42%) que chez ceux dont la souffrance est occasionnelle (22%). Les femmes de moins de 35 ans apparaissent aussi plus enclines à solliciter un suivi (43%, + 15pts par rapport à la moyenne).
Le premier motif invoqué par ceux qui ne consultent pas réside dans la conviction de ne pas en avoir besoin (50% de citations). Cette perception varie selon les profils : 57% des hommes l’avancent, contre 44% des femmes ; les seniors citent cette raison à 66%, contre 46% des jeunes de moins de 35 ans. À cette cause subjective s’ajoute la contrainte plus objective du manque de moyens financiers – cité par 29% des Français. Enfin, 21% évoquent la peur d’avoir recours à un professionnel. Cette dernière dimension illustre le poids persistant du tabou autour de la santé mentale : 72% des Français considèrent que consulter un spécialiste reste un sujet difficile à évoquer –chiffre stable depuis la première vague de l’enquête-, et 65% estiment que cette démarche demeure socialement mal perçue.
3. Une reconnaissance collective de l’importance de la santé mentale mais une vigilance très inégale vis-à-vis de son propre bien-être
Malgré le poids du tabou, plus de la majorité des Français reconnaît l’importance de la santé mentale et de ses enjeux :
- 65% estiment que la souffrance psychique peut toucher tout le monde
- 64% considèrent le bien-être psychologique aussi essentiel que le bien-être physique
- 63% estiment que le bien être mentale est essentiel pour être en bonne santé.
En parallèle de cette prise de conscience théorique, près d’un Français sur deux (47%) reconnaît ne pas être attentif à son bien-être mental en pratique, un chiffre stable depuis 2023. Une majorité d’entre eux aimerait toutefois progresser dans cette démarche (34%), tandis qu’une minorité (13%) y demeure indifférente. Sur ce point, les hommes de moins de 35 ans apparaissent particulièrement détachés (56% reconnaissent ne pas prêter attention à leur santé mentale, contre 42 % de leurs homologues féminins ).
Aussi, 35% des Français se déclarent « tout à fait d’accord » pour considérer la santé mentale comme un enjeu de santé publique prioritaire, en écho à sa désignation comme Grande Cause nationale 2025. Toutefois, seuls 29% jugent que cette initiative du gouvernement a eu un impact positif sur le traitement du sujet, et à peine 37% considèrent que la santé mentale est bien prise en charge par le système de soin français, soit une baisse continue de 7 points depuis 2021.
4. Un sentiment d’inquiétude pour le bien-être mental généralisé et impacté par l’actualité
La santé mentale des jeunes constitue une préoccupation majeure : 82% des Français expriment leur inquiétude pour cette génération, quel que soit leur âge, leur niveau de diplôme ou leur statut parental. Ce consensus montre à la fois l’importance accordée par les Français à la jeune génération et l’association faite, dans l’imaginaire collectif, entre cette jeunesse et une certaine fragilité psychologique. Le niveau d’inquiétude reste aussi très marqué pour le bien être mental des personnes âgées (78%). Le bien-être mental de la population française suscite aussi de vives inquiétudes pour 77% des Français, une hausse de 12 points en quatre ans (62% en 2021).
Corollaire ou cause à l’origine de ce sentiment d’inquiétude généralisé, l’environnement socio-économique et géopolitique agit comme un facteur aggravant. En septembre 2025, 80% des Français estime que l’actualité a eu un impact négatif sur leur état psychologique, soit une hausse de 20 points en quatre ans. L’instabilité politique, les tensions économiques et les conflits internationaux (Ukraine, Proche-Orient) peuvent expliquer ce climat d’anxiété généralisée.