À l’occasion du lancement, ce lundi 17 novembre, de la Semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées (SEEPH) et alors que l’on célèbre les 20 ans de la loi de 2005 sur l’égalité des droits et des chances, l’Ifop a réalisé pour LADAPT, l’Agefiph et le fiphfp une nouvelle enquête : « Handicaps et emploi : l’égalité pour toutes et tous ! ».
Les 7 principaux enseignements :
- La loi de 2005 : une avancée reconnue mais insuffisante face aux attentes d’égalité réelle
Vingt ans après, 60% des personnes handicapées reconnaissent des avancées, mais seulement 12% parlent de changements majeurs. L’égalité professionnelle reste définie avant tout comme « être reconnu pour ses compétences sans préjugés » (41%), révélant que le combat principal reste celui du regard porté sur le handicap. Cette perception mitigée traverse tous les types de handicaps, avec une satisfaction particulièrement faible pour les handicaps psychiques (55%) et les multihandicaps (53%).
- L’insertion professionnelle et le recrutement : un parcours du combattant sous contrainte de discrétion
Du CV à l’entretien, le chemin est semé d’obstacles : refus sans retour (81 %), questions intrusives (57 %), injonction à se taire ou à “arranger” son histoire (62 % cachent certains aspects de leur situation). Plus d’un tiers ne déclare jamais son handicap lors du recrutement (36 % ; 40 % pour les répondants concernés par un handicap psychique), par crainte d’un tri implicite ou d’un malentendu sur leurs capacités. Cette sous-déclaration prive d’emblée des aménagements utiles et fragilise les débuts de parcours ; elle prépare aussi des transitions professionnelles particulièrement risquées.
- L’ambition bridée : quand les obstacles intériorisés limitent les horizons professionnels
70% des personnes handicapées n’ont obtenu aucune promotion en 5 ans (vs 58% de l’échantillon représentatifs des collaborateurs français), une stagnation qui semble intériorisée dès la recherche d’emploi : seulement 56% accordent de l’importance aux perspectives d’évolution (vs 65% des collaborateurs). Cette auto-censure s’explique par l’expérience vécue : 46% identifient les transitions professionnelles comme le moment où l’impact du handicap est le plus fort. Changer signifie perdre les aménagements acquis et recommencer le parcours d’adaptation, transformant toute mobilité en risque plutôt qu’en opportunité.
- L’inclusion à plusieurs vitesses : quand la taille et les moyens déterminent la qualité de l’adaptation
Les données révèlent des réalités contrastées selon les contextes organisationnels. Les cadres (75%) et les collaborateurs d’un employeur de plus de 250 collaborateurs (71%) disposent plus souvent d’outils adaptés, contre seulement 43% des ouvriers. La présence d’un référent handicap transforme l’expérience : 76% des collaborateurs concernés ont des outils adaptés, contre 53% sans référent. Ces écarts massifs dessinent une carte de l’inclusion où les employeurs avec un plus grand nombre de collaborateurs et plus structurés offrent des conditions correctes, tandis que les PME et les postes peu qualifiés cumulent les difficultés d’adaptation.
- L’insécurité psychologique au travail : le prix caché de la différence
Les personnes handicapées évoluent dans un environnement professionnel marqué par l’insécurité : seulement 67% se sentent en sécurité pour signaler un problème sans crainte de représailles (vs 73% des collaborateurs), et 58% ne peuvent évoquer leur santé mentale sans redouter des conséquences négatives. Cette vulnérabilité explique pourquoi, lors de leur recherche d’emploi, elles accordent davantage d’importance aux valeurs de l’organisation (76% vs 70% de l’échantillon témoin des collaborateurs français) et à sa politique d’inclusion (69% vs 54%), cherchant des signaux de bienveillance avant même de postuler. Le paradoxe de l’invisibilité forcée s’enracine dans cette insécurité : 36% ne déclarent jamais leur handicap lors du processus de recrutement, un taux qui grimpe à 40% pour le handicap psychique.
- Les solutions existent et fonctionnent, mais restent sous-déployées
L’enquête révèle un potentiel inexploité : les adaptations techniques fonctionnent (76% satisfaits des outils numériques), le télétravail améliore significativement la qualité de vie (61% vs 47%), et l’intégration réussie génère satisfaction (66%, et 70% dans les entreprises avec un référent handicap) et engagement au sein du collectif (80% de personnes en situation de handicap se sentent intégrés). Le défi est de généraliser à l’ensemble du tissu économique les solutions qui ont fait leur preuve.