Dans le cadre de la publication de son rapport annuel faisant un état des lieux des pays qui pratique la torture dans le monde, l’ACAT France a mandaté l’Ifop pour interroger les Français sur la torture, les représentations qu’ils en ont, les actes qu’ils associent à de la torture et le sentiment qu’elle leur laisse personnellement. Cette étude administrée à un échantillon de 1500 personnes livre les enseignements suivants.
– L’usage de la torture paraît principalement l’œuvre de groupes non-étatiques et de moins en moins répandue dans le monde
Interrogées sur l’identité des principaux tortionnaires dans le monde, les Français pointent des organisations non-étatiques. 51% d’entre eux citent ainsi les membres de guérillas ou groupes armés non-étatiques, tandis que 33% évoquent les membres d’organisations criminelles. A contrario, le concours des administrations étatiques à l’usage de la torture apparaît moins dans les représentations. Les membres des services de renseignements (6% de citations), les militaires (6%), les membres des forces de l’ordre et les policiers (3%) ou encore les gardiens de prison (1%) sont cités très marginalement, alors que la réalité est moins évidente. Les minorités ethniques et religieuses sont logiquement considérées comme le groupe le plus souvent victime d’actes de torture (69% de citations au total), les conflits religieux étant toujours en œuvre dans de nombreux pays ou zones territoriales. Viennent ensuite les opposants politiques (49%), puis les femmes (39%), tandis que les minorités sexuelles (18%), les délinquants et suspects de droit commun (16%) et les journalistes (9%) apparaissent moins dans les premières représentations.
– Le principe du recours à la torture est majoritairement rejeté par les Français, mais se fait des ambivalences pour certains comportements ou certaines situations
Confrontés à différents comportements assimilables à de la torture, les Français les jugent majoritairement inacceptables. Plus de deux tiers des personnes interrogées estiment que le fait qu’un policier gifle un individu lors d’un interrogatoire (75%) ou le fait qu’un soldat prive de nourriture un soldat ennemi pour obtenir des informations (69%) ne se justifient pas. En revanche, l’envoi de décharges électriques par un policier sur une personne soupçonnée d’avoir posé une bombe prête à exploser (54%) ou l’isolement absolu pendant dix jours d’un détenu pour le munir (57%) sont considérés comme justifiés par plus d’une personne sur deux. Le premier cas montre ainsi une acceptation du recours à la torture dans un cas d’extrême urgence dans un contexte où la France a été profondément marquée par les attentats de janvier et de novembre 2015, tandis que le second illustre le fait que l’isolement d’une personne est très minoritairement considéré comme un acte de torture.
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