La cote des politiques est à la baisse en cette avant-dernière vague d’enquête de l’année : 31 reculs de popularité sur les 50 personnalités testées. La bienveillance observée le mois dernier et en septembre ne doivent pas faire oublier la tendance de fond à l’œuvre chez les Français : une défiance structurelle à l’égard de leur personnel politique national qui tend même à contaminer la sphère des élus locaux jusqu’alors épargnée. Ce contexte sur fond d’inquiétudes protéiformes – de l’inflation à la menace terroriste en passant par les périls internationaux – rend méritoire la parfaite stabilité de notre trio de tête. Edouard Philippe, Gabriel Attal et Bruno Le Maire conservent en effet une popularité élevée et identique au mois dernier avec une mention spéciale au Ministre de l’Education, de nouveau « premier des ministres ». Si l’on ajoute à ce trio Olivier Véran et François Bayrou (respectivement +2 et +3 points de bonnes opinions), cela fait 5 personnalités du bloc central aux 10 premières places du classement. Les potentiels candidats de l’après Macron bénéficient de l’atout popularité même si l’on sait que cette carte ne garantit en aucune façon des succès électoraux futurs.
Quant au Président non candidat à sa réélection, il poursuit une lente remontée auprès des Français : +2 points de bonnes opinions après une progression similaire le mois dernier. La remobilisation de son socle du 10 avril 2022 se poursuit également avec 12 points de gagnés (91%).
Tel Giovanni Drogo du Désert des Tartares, lieutenant attendant un ennemi invisible, Le Président comme ses principaux alliés peuvent se rassurer du faible danger apparent constitué aujourd’hui par la plupart des oppositions. Ainsi, les personnalités de LR émergent toutes à la baisse ce mois-ci, à l’exception de Nicolas Sarkozy. Côté gauche, la situation, encore plus délicate révèle la crise finale de la Nupes. Symboliquement, Fabien Roussel ayant récemment annoncé le départ de son parti de cette alliance électorale émerge en tête des personnalités de gauche et se place au pied du podium. En outre, comme le mois dernier, il recueille le plus de soutiens chez les sympathisants de gauche (60%) surclassant désormais de 14 points Jean-Luc Mélenchon, abimé par ses prises de position ambiguës sur le conflit en Israël. Notons à cet égard que la « relève Ruffin » n’en profite pas, le député de la Somme chutant lourdement de 7 places.
Reste le Rassemblement National. Marine Le Pen se stabilise à un niveau élevé dans le Top10 et demeure, au regarde de cet indicateur de popularité, la première prétendante à l’Elysée. Surtout, elle recueille le plus fort taux d’excellentes opinions (14%). Premier accroc en revanche pour Jordan Bardella : en recul de 3 points, le patron du RN paye ses propos récents sur l’antisémitisme de Jean-Marie Le Pen. La sanction est directe auprès des sympathisants LR avec une chute de 17 points. Sur ce terrain également, celui de la normalisation du RN, la route vers l’échéance de 2027 est longue.
Bulles
- Eric Zemmour +3
Premier rebond de popularité pour le fondateur de Reconquête : avec 5 places de gagné, il n’est plus lanterne rouge. Eric Zemmour bénéficie, dans le contexte de menace terroriste et d’inquiétudes sur la situation en Israël, de son statut de Cassandre, celui qui avait prévenu des périls ! De là découlent des hausses parmi les personnes les plus âgées (+4 points) ou chez les ouvriers (+8) et surtout un bond de 22 points chez les sympathisants du Rassemblement national. Pour autant, Zemmour demeure la personnalité la plus rejetée de notre classement avec une majorité de « très mauvaises opinions ».
- Sandrine Rousseau -7
La députée écologiste de Paris pâtit de la chute la plus forte ce mois-ci et descend à la 41ème place, son moins bon rang depuis son entrée dans ce baromètre en février 2022. Moins présente médiatiquement ces dernières semaines comparées à d’autres personnalités de gauche, Sandrine Rousseau prend le risque de la banalisation. En attestent des reculs très élevés dans des catégories forces des écologistes, à savoir les plus jeunes (-13 points chez les 18-24 ans), les sympathisants écolos (-9) et les habitants de l’agglomération parisienne (-12). S. Rousseau garde toutefois une cote majoritaire chez les insoumis (53%).
- François Ruffin -4
Après des progressions régulières depuis plusieurs mois dans notre classement, François Ruffin connait un revers de popularité et perd 7 places. Sans doute le député de la Somme paye un positionnement perçu comme ambigu : entre critiques ouvertement exprimées sur la position de LFI refusant de qualifier de terroriste l’attaque du Hamas et difficulté à rompre ouvertement avec Jean-Luc Mélenchon. Dans ce contexte, François Ruffin recule à gauche (51%, -5 points) mais cette baisse masque un dévissage chez les sympathisants LFI (-14) atténué par des gains chez les proches du PS (+5 points).
- Yaël Braun Pivet +2
L’initiative salutaire de la marche contre l’antisémitisme du 12 novembre contribue à un léger rebond de la popularité de la Présidente de l’Assemblée alors que son homologue du Sénat perd 4 points. Toutefois, la popularité de Gérard Larcher surclasse de 17 points celle de Yaël Braun-Pivet. Celle-ci pâtit toujours d’une notoriété optimisable : plus de 4 Français sur 10 ne parviennent pas à exprimer de jugement à son encontre. Pour autant, elle bénéficie de scores appréciables chez les personnes âgées (34%), les cadres (35%) et chez les sympathisants de la majorité (43% chez Renaissance).
- Jean-Luc Mélenchon -2
Plus longue sera la chute pour le 3ème homme de la dernière élection présidentielle. En baisse de cinq points depuis septembre, Jean-Luc Mélenchon passe sous la barre des 30% et émerge – après Eric Zemmour – comme personnalité la plus impopulaire du pays. Il paye à la fois ses outrances et de récents propos flirtant avec l’antisémitisme qui tendent à le « Jean-Mariser ». Dans le détail, Mélenchon devient pour la première fois minoritaire auprès des sympathisants de gauche (46%, -4 points) et son socle présidentiel se fissure : 68% de ses électeurs du premier tour le soutiennent, 8 points de moins en un mois.
- Eric Dupont Moretti +3
Seul poids lourd du gouvernement à progresser significativement, le Garde des Sceaux gagne 6 places et obtient son score les plus élevé depuis son entrée dans ce baromètre. Le contexte compliqué de comparution depuis le 6 novembre devant la Cour de Justice de la République n’a pas contre intuitivement provoqué de rupture entre les Français et E. Dupont Moretti mais a peut-être à l’inverse suscité un courant de sympathie. Le même phénomène se produit pour François Bayrou, aux prises avec le procès des assistants parlementaires du Modem. Sa cote de popularité est également en hausse de 3 points.
Chiffre du jour 80%
La remontée significative de la cote de Nicolas Sarkozy après une rentrée difficile marquée par sa position singulière sur la guerre en Ukraine et des attaques jugées peu dignes à gauche sur François Hollande est liée à un bond spectaculaire auprès de son cœur de cible. En effet 80% sympathisants LR expriment leur bonne opinion à l’égard de l’ancien locataire de l’Elysée, soit +10 points depuis octobre. Nicolas Sarkozy émerge en pole position devant le trio E. Philippe, G. Larcher et L. Wauquiez (74% pour chacun)
Frédéric Dabi, Directeur Général Opinion de l’Ifop
