Les offres de rachat d’Alstom, formulées par General Electric et Siemens, ont suscité de nombreuses réactions politiques mais ont également eu un fort écho dans l’opinion publique. Ainsi selon le Tableau de Bord politique Ifop pour Paris-Match, 48 % des Français en ont parlé avec leurs proches, chez eux ou au travail, faisant de ce thème le troisième sujet évoqué ces derniers jours, derrière les affrontements en Ukraine (56 %) et la hausse du chômage (53 %).
La réaction suscitée dans la population par l’annonce du rachat de ce fleuron industriel est comparable à celle enregistrée en juillet 2007 lors de la vente par Danone de sa branche biscuits au groupe américain Kraft Foods (48 % des Français avaient évoqué le sujet à l’époque) mais supérieure à l’écho engendré par l’OPA de Mittal sur Arcelor en février 2006 (42 % en avaient parlé). L’opinion réagit donc promptement quand un symbole du patrimoine industriel national passe sous pavillon étranger, mais le rachat d’entreprises étrangères par des groupes français ne provoque guère de réactions. En février 2004 par exemple, seuls 18 % de nos concitoyens avaient discuté avec leurs proches de l’OPA de Sanofi sur l’allemand Aventis…
Si les offres de rachat d’Alstom ont fait autant parler ces derniers jours c’est parce que cette annonce vient d’abord illustrer la faiblesse dans laquelle se trouve actuellement notre économie, la vente de ce fleuron industriel français renforçant, si besoin était, le pessimisme très profond qui assaille notre pays. Ainsi seuls 16 % des Français la perçoivent plutôt « comme une bonne chose car cela signifie que les entreprises françaises sont de qualité et que la France est économiquement attractive » quand une écrasante majorité, 71 %, y voit plutôt le signe « que les entreprises françaises ne disposent pas d’assez de ressources financières pour se développer et que notre pays est en déclin ».
Cette vision très négative est partagée dans toutes les familles politiques, avec une intensité un peu plus forte au FN (84 %) et au Front de Gauche (75 %), qu’à l’UMP (72 %) ou au PS : 62 % des sympathisants socialistes partageant cette analyse contre 24 %, seulement qui font une lecture plus positive de cette annonce. De la même façon, le regard porté sur le rachat d’Alstom par General Electric ou Siemens est le même dans toutes les tranches d’âge et catégories sociales. Si la vision pessimiste est retenue par 73 % des ouvriers, ce sont également 68 % des cadres supérieurs et 66 % des professions intermédiaires qui font ce constat. On comprend pourquoi, à la lecture de ces chiffres, François Hollande et Arnaud Montebourg se sont autant mobilisés sur ce dossier ces derniers jours, conscients qu’ils étaient des dégâts qu’allaient causer dans l’opinion l’annonce du passage sous pavillon étranger d’un nouveau pan du patrimoine industriel national, entreprise que, de surcroît, Nicolas Sarkozy avait partiellement nationalisée pour la sauver de la faillite il y a dix ans.
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